Deux cas spéciaux de feux de navigation

Ce court texte fait la description de deux cas particuliers de feux de navigation qui m’ont été exposés dans les derniers jours. Les deux sont en situation de visibilité réduite, ou de nuit. Je trouvais les exemples intéressants parce qu’ils révèlent des parties de la signalisation maritime qui sont moins connus.

Trois lumières rouges

Vous êtes à proximité d’un port et un épais brouillard limite la visibilité de manière importante. À l’horizon, vous voyez trois lumières rouges superposées apparaître (image de droite). Quelle interprétation faut-il adopter de ces feux? Que devrions-nous reconnaître?

Quiconque connaissant le Règlement international de prévention des abordages en mer sait que la règle 28 précise que trois feux rouges superposés et visibles sur tout l’horizon désignent un navire contraint par son tirant d’eau. C’est une première interprétation possible des trois feux identifiés.

Si tel est le cas, il faudrait alors manœuvrer de manière à éviter le navire en suivant les règles prescrites par visibilité réduire (règle 19).

Cela dit, si c’est un tel navire, où sont les feux de côté de ce navire? Et s’il ne navigue pas, où est son (ou ses) feux d’ancrage? L’absence d’autres feux et la proximité du port devrait peut-être donner la puce à l’oreille qu’une autre interprétation est possible. Mais plus encore, il faut également se rappeler de la modification canadienne à l’effet qu’au Canada, les navires ne doivent pas montrer les trois feux rouges.

Une autre interprétation est que ces feux sont à proximité d’un point d’entrée au port… et le port signale qu’il est interdit d’y entrer (image ci-dessus). Dans ce cas, l’interprétation est qu’on est peut-être proche d’un bras de mer!

La convention du dernier paragraphe est moins connue, mais relève de l’Organisation internationale des systèmes d’aide à la navigation. L’IALA (en anglais) est responsable de coordonner les couleurs et les feux pour les bouées. On connait l’organisation surtout pour les deux systèmes mondiaux de couleurs et de bouées (le Canada est dans le système B). Elle publie cependant un guide sur les signaux au port. L’image ci-dessus est un extrait du rapport.

Si vous avez déjà passé par la Marina de Québec, vous avez déjà vu ces feux en action à l’entrée de l’écluse du bassin. Quand ils sont rouges, c’est que l’écluse est fermée, ou que des voiliers sortent de l’écluse. Il faut entrer dans l’écluse seulement quand les feux sont verts.

Une lumière jaune scintillante

Vous êtes à proximité d’une base militaire canadienne et vous voyez un navire sur l’horizon. Ce dernier affiche les feux de côté usuel (vous voyez son feux bâbord) ainsi que le feux de tête de mât usuel d’un navire. En plus, vous voyez un feux à éclat jaune qui s’allume et s’éteint environ au rythme de 90 battements par minute. Quel est ce type de navire?

L’image laisse croire que c’est un aéroglisseur. Le règlement sur la prévention des abordages en mer suggère également que c’est ce type de navire. En effet, les aéroglisseurs doivent avoir un feux à éclat jaune visible sur tout l’horizon. C’est certainement la chose à laquelle je penserais d’abord si je voyais cette situation en pratique.

Cela dit, deux éléments devraient suggérer que ce n’est pas ce type de navire. D’abord, le RIPAM précise qu’un feux jaune à éclat bat à raison de 120 battements par minute (contrairement à 90). Ensuite, si on voyait la situation décrite en pratique, on verrait un navire qui se déplace beaucoup plus lentement qu’un aéroglisseur. Et surtout, il serait beaucoup plus long.

Dans son édition annuelle des avis aux navigateurs, la Garde-côtière canadienne publie un mémorandum détaillant les feux de navigation des sous-marins de la Royal Navy. Évidemment, ces feux ne sont affichés que lorsqu’ils veulent être visibles … et quand ils sont à la surface. Au paragraphe 3b), on verra qu’ils arborent une lumière jaune à éclat de 90 battements par minute.

Bref, on ne fait pas face à un aéroglisseur, mais à un sous-marin. Si on veut éviter les torpilles, c’est peut-être mieux de s’en tenir loin!

De quoi se coucher moins niaiseux!

Les deux cas constituent un rappel que bien que le RIPAM soit une référence importante pour identifier les feux de navigation de nuit, ce n’est pas la seule référence. Il faut savoir l’interpréter en tenant compte des systèmes d’aide à la navigation, dans ce cas-ci les lumières du port, de même que des conventions militaires (les navires militaires ne sont pas tenus par le RIPAM) ou d’autres sources détaillant des conventions locales.

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