J’ai pu tester l’AIS NOMAD 2 de Digital Yacht. En substance, c’est un excellent produit. Je présente brièvement ce qu’est la technologie AIS et détaille les spécificités du Nomad 2 ci-dessous.
Qu’est-ce qu’un AIS?
L’acronyme « AIS » vient de l’anglais et désigne l’expression « Automatic Identification System », ou Système d’identification automatique en français. L’AIS est une technologie combinant la radio VHF et le GPS pour communiquer des informations de navigation aux autres navires, dont le nom, le numéro MMSI, la vitesse et le cap sur le fond (COG/SOG), la vitesse de rotation, la position, et la distance et le temps de rapprochement maximal (CPA/TCPA).
En pratique, un AIS est un mini-ordinateur doté d’une antenne qui est soit intégré à la radio VHF, soit complètement séparé (images ci-dessous). Ce mini ordinateur communiquera alors les informations de navigation des autres navires soit sur un écran intégré, soit sur un réseau WIFI auquel pourront se brancher les ordinateurs embarqués de votre bateau.
Les navires commerciaux de plus de 500 tonnes, de 200 tonnes faisant des voyages internationaux et les navires de passagers doivent automatiquement avoir un AIS à bord. Ces derniers sont dit de « classe A », leur donnant une priorité sur les ondes. Ces AIS sont nécessairement émetteurs et récepteurs, signifiant qu’ils émettent leur position, mais reçoivent également la position de ceux qui émettent.
Les navires de pêche, de plaisance ou les petites embarcations ne sont pas obligées d’avoir un AIS. Si elles en ont à bord, ce sera alors un modèle de « classe B », leur donnant un privilège moins élevé sur les ondes. Cela signifie que dans des endroits congestionnés (avec beaucoup de trafic), les AIS de classe B recevront l’information de manière moins régulière, laissant les ondes aux AIS de classe A. En somme, l’AIS privilégie d’éviter les collisions avec des « gros navires ».
Les AIS de classe B peuvent être récepteurs seulement, ou émetteurs et récepteurs, au choix de l’acheteur. S’il n’est pas émetteur, l’AIS ne fait que recevoir l’information des navires environnant. Dans ce cas, le bateau sur lequel il est installé est invisible sur les AIS des autres navires. Évidemment, c’est plus sécuritaire si l’AIS est émetteur, mais il faut alors être prêt à débourser le prix plus élevé d’un AIS qui est à la fois émetteur et récepteur.
J’ai déjà rédigé sur l’importance du point de rapprochement maximal. C’est un outil d’aide inestimable pour éviter les collisions. On peut aussi se renseigner davantage sur le site de la Garde Côte du Canada.
Le NOMAD 2
Le NOMAD 2 est un AIS émetteur et récepteur. Il coûte environ 1300$. Il est indépendant d’une radio VHF. Sur le plan électrique, il demande une connexion USB et consomme entre 0.60 et 0.62 ampère par heure. Il requiert également une connexion à une antenne, qu’il faut déployer. Il vient avec (environ) dix mètres de câble fixé à l’antenne, de même que les connecteurs nécessaires pour brancher les câbles à la boîte.
Le NOMAD 2 peut soit générer un réseau WIFI sur le bateau, soit se connecter à un réseau WIFI déjà existant. Il communique alors les données AIS via le protocole standard NMEA. Ce faisant, n’importe quel ordinateur de bord doté d’applications lisant les données NMEA pourra recevoir et interpréter les données AIS. En particulier, c’est le cas des ordinateurs ou téléphones avec OpenCPN ou Boating (Navionics) d’installés. Bien sûr, les informations seront aussi accessibles aux ordinateurs marins embarqués (Raymarine, B&G, etc.).
Le NOMAD 2 est de plus programmable, à savoir qu’il est possible de modifier les informations propres au bateau qu’il représente (images ci-dessus). En particulier, il est possible de modifier les dimensions du bateau, son numéro MMSI, son nom et sa nature. Sa programmation passe par un formulaire sur une page web qui est accessible sur le réseau wifi. Contrairement aux AIS qui ne sont pas programmables, on peut ainsi le déplacer d’un bateau à un autre et adapter les données communiquées.
Essai pratique
J’ai testé le NOMAD 2 en deux circonstances. La première est lors d’un convoyage d’un voilier où j’ai installé l’antenne sur une des barres de flèche, à mi-hauteur de mât. Comme l’installation était temporaire, le boîtier de l’AIS était disposé sur une tablette du carré et l’antenne n’était fixé à la barre de flèche et aux haubans qu’avec des « tie wraps ». L’installation est illustrée ci-dessous. Soulignons l’évidence: pour une installation permanente, on fera certainement quelque chose de plus élégant!
Je me suis alors branché au réseau wifi à partir de mon téléphone cellulaire et j’ai pu voir sur Boating que l’application recevait bien les données de l’AIS. Les données sont illustrées ci-dessous, avec des copies d’écran de mon téléphone. Les images illustrent une seule rencontre, mais l’AIS a communiqué les informations, sans failles, pendant tout le convoyage.
J’ai aussi testé l’appareil dans le cadre d’une flottille d’instructeurs de mon école de voile. L’exercice servait notamment à mettre les instructeurs à jour des récents changements au programme de Voile Canada, mais a aussi servi à faire des exercices pratiques de « fausses collisions ». Nous avons installé l’AIS sur un des voiliers de l’école et avons ensuite fait des exercices pratiques de rapprochement, afin que les instructeurs sur d’autres voiliers dotés d’un AIS récepteur puissent voir l’évolution pratique du CPA, du TCPA et des alarmes de collision.
Dans les deux cas, l’AIS a fourni les informations attendues d’émission et de réception.
Verdict et bémols
Le produit livre la marchandise. Je trouve certainement qu’il vaut la peine d’être acheté et il sera installé sur Jean-du-Sud. En particulier, sa capacité programmable suggère un gain économique pour trois types d’organisations: les compagnies de charter, les personnes qui font des convoyages et les écoles de voiles.
Les écoles et les compagnies de charter n’ont pas de besoin d’avoir un AIS installé en tout temps sur leurs navires, mais seulement lors de locations ou de formations spécifiques. Ce faisant, en n’achetant qu’un nombre restreint d’AIS programmables, ils peuvent générer des économies. Quant aux convoyeurs, un AIS émetteur est une assurance additionnelle qu’ils sont visibles à chaque bateau qu’ils déplacent. Ils procurent ainsi une valeur ajoutée à leurs services.
Je souligne trois bémols au NOMAD 2, soit son manuel d’installation, sa portée et son absence d’option de programmation du statut RIPAM.
À la première installation, en mer, j’ai constaté que le manuel ne contenait aucune indication sur le mot de passe permettant de se connecter au réseau WIFI. Nous avons dû contacter la compagnie par téléphone iridium pour être en mesure d’avoir l’information! C’est un rappel de l’importance de tester l’équipement avant de partir, mais c’est aussi un manque manifeste au manuel.
Quant à la portée, elle semble relativement faible. Les navires semblaient apparaître sur l’écran qu’à des distances entre 2 et 8 milles nautiques. C’est possiblement à cause de notre installation temporaire, moins haute, mais aussi à cause de son design peu énergivore.
Autrement, les options de programmation ne permettent pas de changer le statut RIPAM. En particulier, une option indiquant la différence entre le voilier ou le bateau à moteur serait particulièrement appréciée. Actuellement, on ne peut choisir que « pleasure vessel » (navire de plaisance).
Finalement, les informaticiens lisant ce texte auront peut-être vu des indices intéressants quant à l’ordinateur du NOMAD 2: réseau wifi, serveur http et interpréteur de données NMEA. Je n’ai pas encore ouvert la boîte, mais je ne serais pas surpris de trouver un Raspberry Pi (ou équivalent) à l’intérieur. Cela signifie que le NOMAD 2 est probablement capable de faire beaucoup plus que de transmettre que des données AIS. Inversement, c’est un signal qu’on peut se bricoler un AIS maison à partir d’un Raspberry Pi, une option moins coûteuse, mais qui demande certainement plus du temps.
Références
Digital Yacht (s.d.). Nomad 2 – Portable AIS Transponder, document récupéré en ligne en mai 2024 à partir de cette adresse.
Garde côtes du Canada (2021). Système d’identification automatique de bord, document récupéré en ligne en mai 2024 à partir de cette adresse.
Gouvernement du Canada (2021). Identités dans le service mobile maritime (ISMM) et identités maritimes (IM), document récupéré en ligne en mai 2024 à partir de cette adresse.
Pier du Sud (2023). Sur le point de rapprochement maximal, document récupéré en ligne en mai 2024 à partir de cette adresse.
yanlak1234 (2022). Step to step guide on building AIS receiver on a Raspberry Pi, document récupéré en ligne en mai 2024 à partir de cette adresse.